LE RÉGIME ACTUEL DE LA TVA SUR LE E-COMMERCE ET SON ÉVOLUTION
Selon les dernières données de la Commission Nationale des Marchés et de la Concurrence (CNMC) publiées en 2020, le commerce électronique de biens et de services en Espagne a avoisiné les 12 milliards d'euros au second trimestre 2019.
La fiscalité indirecte du e-commerce est en pleine mutation. Face à la croissance de ce secteur dans tous les Etats membres, l'Union Européenne a commencé à adapter son cadre juridique et fiscal afin d'optimiser les recettes de la vente en ligne et de lutter contre la fraude : un premier ensemble de réformes est entré en vigueur en janvier 2019, et un second est prévu pour janvier 2021. La Commission Européenne estime que grâce à ces nouvelles mesures, 5 milliards d'euros seront récupérés en 2020 et 7 milliards d'euros en 2021.
Ces futures réformes visent à moderniser et à simplifier la vente de biens en ligne aux particuliers. Actuellement, l'imposition de la TVA sur ces ventes est soumise au régime dit de « vente à distance ». Ce régime prévoit que les ventes à des particuliers établis dans un autre pays de l'UE soient assujetties à la TVA du pays d’origine jusqu'à un certain seuil de vente ; ce seuil est fixé par chaque État membre. Au-delà du seuil établi (qui, dans le cas de l'Espagne, est à 35 000 euros), les ventes sont assujetties à la TVA du pays de destination. Par conséquent, le vendeur devra appliquer la TVA du pays de destination.
D’un point de vue administratif, il est difficile d’appliquer correctement ce régime de TVA pour la vente à distance puisque chaque pays a des taux d'imposition, des modèles fiscaux, une périodicité différente et des procédures administratives plus ou moins longues. Il était aussi indispensable de prendre en considération le poids croissant des plateformes de vente en ligne, telles qu'Amazon ou Ali express, entre autres, qui complexifient d’autant plus l’application fiscale.
Les nouveautés qui entreront en vigueur dès 2021 visent à améliorer la taxation de ces ventes, ainsi qu´à faciliter et limiter la charge administrative des agents économiques. Cela concerne particulièrement les micro-entreprises qui développent leur activité dans toute l'Union Européenne et doivent respecter leurs obligations en matière de TVA sur plusieurs territoires.
- Révision du seuil de ventes à distance
Le seuil de ventes à distance a été harmonisé dans le but d´établir un seuil commun à tous les pays de l'Union Européenne qui sera de 10 000 euros à partir du 1er janvier 2021. Au-delà de ce seuil, ce sera la TVA du pays de destination qui s’appliquera sur les ventes réalisées.
- Déclaration de la TVA depuis le pays d’origine
Le système de "mini guichet unique TVA" (« Mini One Stop Shop », MOSS en anglais) a également été amélioré. Ce système existe déjà depuis 2015 pour les services de télécommunications, la radio, la télévision et les services fournis par voie électronique. Grâce à ce système de guichet, les entreprises effectuant ces opérations ne sont plus obligées de s'identifier et de s'enregistrer dans chaque état de destination. Ils présentent leurs déclarations depuis leur Etat de résidence sur un portail mis en place à cet effet. Il est prévu qu’à partir de 2021, les entreprises soumises au régime dit de « ventes à distance » pourront elles aussi utiliser ce système de guichet pour payer la TVA depuis leur pays d'origine, TVA qui sera ensuite redistribuée dans le reste des pays de l'Union Européenne à travers le MOSS.
- Taxation des plateformes de ventes en ligne
L'une des nouveautés les plus controversées est la mesure visant les plateformes qui facilitent ces ventes de biens en ligne. À partir de 2021, ces plateformes seront chargées de collecter et de payer la TVA sur ces ventes.
Selon la réforme, ce type de ventes en ligne est séquencé en deux opérations soumises de manière différentes à la TVA : une première livraison du vendeur à la plateforme numérique qui sera considérée comme exonérée et une seconde de la plateforme à l'acheteur final soumise à la TVA. En outre, les plateformes devront créer un registre des livraisons effectuées qui devra être conservé pendant 10 ans pour permettre aux autorités fiscales communautaires de vérifier si elles ont été correctement déclarées.
- Fin de l’exonération pour la vente en ligne de biens de faible valeur
La Commission Européenne a décidé de supprimer l'exemption sur les importations de biens de faible valeur qui était fixée à 22 euros. Dans la pratique, certains agents économiques importaient des biens de plus grande valeur (par exemple, des smartphones ou des tablettes) et fraudaient en déclarant les biens à une valeur inférieure à 22 euros pour bénéficier de l’exonération.
Une nouvelle mesure est prévue en remplacement, "Import One Stop Shop" (ou IOSS), pour les marchandises dont la valeur ne dépasse pas 150 euros. En appliquant l'IOSS, un vendeur établi dans un pays hors Union Européenne (sauf si un accord d'assistance mutuelle a été signé) devra désigner un intermédiaire qui s'acquittera en son nom et représentation des obligations en matière de TVA. Pour les agents établis dans l'Union Européenne qui effectuent des ventes à distance de biens importés, la désignation de cet intermédiaire sera volontaire. Un numéro de TVA spécifique sera attribué à ces vendeurs en application de cette nouvelle mesure.
Avec l'IOSS, la TVA appliquée aux clients sera exigible au moment de la livraison des biens et non au moment de l’importation des biens.
L'entrée en vigueur de ces mesures en 2021 aura un impact significatif sur la gestion de la TVA pour les opérateurs du e-commerce. Ces entreprises seront donc amenées dès cette année à revoir leurs procédures et leurs systèmes de gestion afin de les adapter au nouveau règlement.
Pour plus d’informations sur l’actualité fiscale intracommunautaire en Espagne et son impact sur votre activité, contactez le French Desk de BDO.
Traduction de l’article de Andrés DIAZ, disponible sur le blog de BDO Spain